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Garba

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Description
Le garba est un plat populaire ivoirien à base de semoule de manioc, appelée Attiéké, accompagnée de thon, essentiellement vendu dans de petites échoppes de rue généralement tenues par des hommes haoussa.

Tous les matins, les ruelles des communes populairesd’Abidjan dégagent une odeur reconnaissable par tout abidjanais digne de ce nom. Et c'est assurément l'inévitable rituel tous les matins à Abobo, Anyama, Treichville, Adjamé, Cocody. Les communes de la capitale ivoirienne. Ce doux parfum d'oignon et de thon en train de frire dans l'huile, peu de personnes avoueront pouvoir y résister. « Les Ivoiriens ne peuvent résister à cette odeur-là et c'est ce qu'il faut pour attirer tout de suite le client, comme pour leur dire que le Garba est prêt », une baraque en bois à la propreté sommaire qui sert à son activité. Et dans les instants qui suivent, c'est le début de la ruée ; un attroupement commence à se former.

Les poissons revêtus d'une couleur or, à peine sortis de l'huile bouillante, s'arrachent à coup de fourchettes. La queue est particulièrement prisée, de quoi entrainer quelques petites disputes. Et parfois, c'est durant la friture que le poisson est réservé. C'est que, pour les « connaisseurs », la magie du Garba s'opère surtout avec du poisson chaud.

C'est quoi un bon garba? « Il faut d'abord du poisson thon enrobé de farine, grillé à l'huile et présentant un aspect doré légèrement foncé, du bon attiéké, suffisamment d'oignon et de piment frais, une bonne cuillère d'huile de friture, voire plus, pour bien « mouiller » l'attiéké, un cube d'assaisonnement ou, à défaut, du sel. Et chaque bouchée doit être un mélange de ces éléments et je t'assure c'est inexplicable », nous expliquentles inconditionnels.

Un plaisir abidjanais

Ce plaisir, il est surtout réservé aux Abidjanais, dans la mesure où on trouve rarement du thon à l'intérieur du pays. Et pour ceux qui arrivent pour la première fois dans la capitale, c'est quasiment le premier plat demandé ou servi pour faire plaisir. Même quand on vient de l'extérieur.

Pour Paris Kouassi, un ivoirien de la Diaspora, l'initiation au garba fut assez périlleuse. « Quand je suis arrivé en Côte d'Ivoire en 2008, mes cousins à Abidjan se sont empressés de me faire découvrir ce plat typique dont ils m'avaient tant parlé. A la première bouchée, j'ai plutôt ressenti ce mélange granulé au goût si différent du couscous qui m'a laissé sur ma faim et que j'ai eu du mal à digérer. Mais j'avoue qu'aujourd'hui chaque fois que je le peux, surtout les week-ends, je ne m'en prive pas » indique-t-il.

D'où vient ce met si simple qui attise tant les papilles des Ivoiriens?

Pour connaître l'origine de ce qui est parfois appelé « attiéké-poisson thonzéguen, foin, guéroganguatte, béton, "dur" ou zeh », il faut se fier à la légende populaire. C'est un ressortissant nigérien qui aurait eu l’idée de proposer de l’attiéké avec le thon grillé et comme accompagnement simple de l’oignon et du piment frais découpé en dé. La dénomination « Garba » est manifestement liée au fait que ce mets est essentiellement vendu par des ressortissants nigériens car travaillant aux ports comme porteurs ils arrivaient de temps à autres à se dégoter quelques thons q qu’ils envoyaientdans leurs garbadromes pour vendre, « Garba » qui signifie "garçon", étant un patronyme populaire au Niger. Et comme le plat était fait par des garçons et qu’il fallait aussi de la force et la volonté pour s’en procurer à cause des files d’attente Alors, l’Ivoirien a baptisé ce plat Garba. Le thon alors considéré comme moins noble et donc ayant une moindre valeur marchande, permettrait de composer un repas simple à petit tarif. Adopté d'abord par les ouvriers aux abords de grands chantiers, puis dans les quartiers populaires, ce sera surtout dans les années 1990 dans les cités universitaires, avec la crise économique, que ce repas sommaire va connaître son ère de gloire.

Le repas du pauvre a triomphé

Le plat est d'abord réputé comme la nourriture des personnes de condition sociale modeste pour ne pas dire pauvre. II sert bien souvent à la fois de petit-déjeuner, de déjeuner et de diner, avec délectation faut-t-il le préciser, dans les quartiers populaires. « C’est plus accessible et un bon garba permet de tenir toute la matinée, voire une bonne partie de la journée.

J'ai juste besoin d'un plat attiéké 100 francs, poisson 200 ou 250 francs (soit un total de 300 à 350 FCFA, soit 0,5 euro)», avancent certains clients, attendant de choisir un poisson chaud, près d'un garbadrome. Dans les années 80, il fallait jusqu'à trois fois moins pour s'offrir un bon plat d’attiéké, raconte un homme plus âgé mais le Garba est parvenu à intégrer triomphalement toutes les classes sociales. « Le cadre d'aujourd'hui était l'élève ou l'étudiant d'origine modeste d'hier dont les études ont été agrémentées par le bon Garba »commente le vendeur, un étudiant dans un baraquement fait de planches et d'une toiture en sachets plastiques, largement suffisant pour ce « job de vacance ».

Une affirmation que soutiennent, certains cadres de l’administration regroupés entre midi et deux dans un restaurant chic Au plateau arborant l’enseigne « le Garba du fonctionnaire », assiettes en porcelaine en main. « Au Plateau, c'est avec bonheur que j'ai pu découvrir le parfum du garba par un heureux hasard. Et j'envoie régulièrement un de mes collaborateurs m'en acheter à midi. Cela me rappelle l'ambiance des années lycée et université.

C'était à l'époque tout ce que je pouvais m'offrir et j'étais loin de me plaindre tant j'en étais accroc ». Aujourd’hui toutes les classes sociales consomment du Garba. Les garbadromes existent sur toute l’étendue du territoire et même il s’exporte énormément. Il existe des différents types de garbadromes allant du classique aux garbadromes de luxe. Ce plat fait partie des propositions de fast food en ligne qui les distribuent un peu partout dans Abidjan.

Les jeunes ivoiriens investissent l'activité

Il a fallu 10 ans pour voir les premiers jeunes ivoiriens rentrer dans ce secteur d’activité. En 2010 nous avons commencé àvoir pousser un peu partout plusieurs garbadromes à Abidjan et à l’intérieur du pays. Cela a tellement vite avancé qu’en 2016 la cote d’ivoire a connu sa première pénurie de manioc. Cet aliment depuis le début de l’année 2016 se fait de plus en plus rare sur le marché. Il faut y mettre du prix pour pouvoir en manger à satiété. Bassirou Bonfoh, Directeur Général du Centre suisse de recherche scientifique (CSRS) donne les raisons de cette pénurie et les moyens d’y apporter une réponse adaptée.

L’attiéké, nourriture de grande consommation en Côte d’Ivoire est de plus rare sur le marché.

L’histoire naturelle du manioc montre que la racine à partir de laquelle l’attiéké est produit, est une plante cultivée dans les jachères et les sols pauvres.
Quand l’on prend l’exemple du Nord de la Côte d’Ivoire, lorsqu’une famille commençait à manger du « Koncondé », cela signifiait qu’elle était en crise alimentaire. Le « gari » au Togo, était considéré comme la nourriture donnée aux prisonniers. Ces spéculations ont évolué en valeur, les technologies aidant, l’on a pu transformer le manioc en différents produits qui se sont intégrés petit à petit dans l’alimentation des ménages et de la population. Ce qui a révolutionné le manioc est qu’à un certain moment, l’on s’est rendu compte que l’amidon de manioc était très intéressant pour les industries alimentaires et textiles. D’où la poussée vers l’industrialisation tous azimuts. L’industrie utilisait de l’amidon alternatif (ex. maïs) pour les suppléments alimentaires, le textile, les bouillons de cube d’assaisonnement. Il fallait donc résoudre le problème de compétition entre le maïs alimentaire et son amidon en industrie qui revenait très cher. La recherche a trouvé une alternative pour les industries quand l’on s’est rendu compte que l’amidon de manioc était très adapté. Donc vous voyez qu’avec la consommation d’une population qui croit, l’utilisation dans l’industrie, la demande devient forte. La production a certes augmenté mais l’offre de manioc n’a pas atteint le niveau de la demande industrielle. Il a donc fallu une volonté politique au travers le Centre suisse de recherche scientifique et le CNRA Ivoirien pour juguler cette crise. Après quoi nous avons assisté à la recrudescence de tout type de garbadrome en Côte D’ivoire.

 

Certaines enseignes arborent l'écriteau « Garba choco »: une expression valorisante qui en dit long sur la nouvelle tendance dans ce secteur d'activité avec des Ivoiriens qui tentent désormais d'intégrer le milieu dominé par les ressortissants nigériens, en mettant un peu plus l'accent sur l'hygiène. C'est que la décennie de crise qu'a traversé le pays a douché bien de rêves de bureaucrates et vendre du garba fait partie des petits boulots vers lesquels se replient nombre de jeunes ivoiriens.

Aujourd’hui dans les garbadromes populaires les prix s’affichent entre 200 et 2500 pour un plat contre 2000 et 10000 pour les garbadromes de luxe. Le Thon provenant exclusivement du port thonier d’Abidjan, le gouvernement a pris des mesures de protection de notre littoral pour empêcherla pèche clandestine et réguler celle-ci afin que l’ivoirien puisse toujours avoir du poisson en quantité et en qualité.

Le gouvernement, conscient de la renommée de l'attiéké, en a fait en a une marque déposée et d'en industrialiser la production pour mieux le valoriser. Reste à espérer que, comme le café et le cacao, il ne deviendra pas lui aussi un luxe pour les Ivoiriens.

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